Accéder au contenu principal

Jusqu’au bout du Japon


Cap Sōya marque notre arrivée au bout du Japon, là où la mer se confond avec la Sibérie. Montées raides, tempêtes annoncées et volcans surgissant de l’horizon rythment notre chemin. À chaque étape, l’aventure s’écrit dans la force brute d’Hokkaidō.

De retour à Hamabetsu, le lac réverbère un bleu cyan apaisant. Nous sommes à nouveau en lien avec la magie d’Hokkaido. Nous avons retrouvé nos vélos et une nouvelle énergie nous emmène le long de cette côte sauvage. Le vent nous pousse, avalant les kilomètres. La mer de Okhostk souffle toujours son énergie du Grand Nord reliée à la Sibérie et l’île de Sakaline que nous apercevons au loin. Les cerfs et biches nous regardent passer, alors qu’un renard saute sur sa proie.


Nous rejoignons enfin les montagnes du cap Nord. Nous grimpons le long des côtes qui révèlent ces paysages habités uniquement par le vent. Puis nous arrivons au point le plus au nord du Japon. Le cap Soya. Splendide spectacle de ce bout du monde, où les pêcheurs se nourrissent du saumon, des algues qu’ils font sécher et des coquillages qu’ils attrapent à marée basse.


Nous sommes émus de tout ce chemin, de ce que Fibie et Nayla ont roulé pour rejoindre ce lieu isolé. De toute cette force, de toute cette énergie et surtout de toute cette confiance qu’une voie est possible. Elles sautent devant le monument qui représente l’ouverture sur une autre partie du monde, sur un autre territoire. Pour elle pourtant, les frontières n’ont aucun sens, seule la terre a sa propre vibration.

Ce matin, nous nous levons aux premières lueurs à 4 heures. Une nouvelle tempête est prévue pour ce soir. Nous roulons alors au plus vite les 30 kilomètres afin de rejoindre la petite ville de Wakkanai. Soudain, dans un contour, le volcan Rishiri apparaît, s’élevant au-dessus des terres. Nous sommes surpris par la grandeur de ce cône, par son énergie de feu. C’est somptueux. Arrivés à Wakkanai, nous retrouvons avec joie les noms inscrits en cyrillique, ainsi que le pain russe que l’on déniche dans une épicerie.


La dernière montée pour accéder au camping est tellement raide que nous devons pousser nos vélos, cette fois nous sommes à plus de 15 %. Nous choisissons l’endroit le plus élevé pour planter la tente, mais les intempéries, d’il y a quelques jours, ont déjà gorgé le terrain d’eau, et plus de 100 mm de pluie sont annoncés pour demain. Nous sommes à nouveau en alerte maximale. Nayla et Fibie ont ouvert leurs antennes pour les champignons, alors elles partent dans la forêt à la recherche de spécimens. Elles découvrent l’amanite Césars, qui ressemble à un œuf. En quelques heures, l’œuf éclot. Sa volve se déploie dans un orange lumineux. C’est incroyable à voir. Puis elles découvrent des dizaines d’autres sortes qu’elles photographient et dessinent. Nous ne sommes pas encore suffisamment aguerris pour les récolter sans aide.


Au réveil, les flaques d’eau inondent déjà le terrain. Nous décidons de laisser la tente et tout notre matériel. Nous allons rejoindre un onsen à 2 kilomètres à pieds. Cette fois, nous avons la possibilité de nous relaxer dans l’eau chaude. Vu la météo, c’est presque un luxe. Nous rentrons finalement de nuit, sous une pluie battante.

Toute la journée, nous avons à nouveau fait et défait des plans et des itinéraires. Nous voulions découvrir les îles de Rebun et Rishiri, mais le temps joue contre nous. De nouvelles précipitations sont prévues, et surtout un vent de dos est annoncé durant 2 jours pour redescendre au sud le long de la côte. Ce qui n’arrive que quelques jours par mois uniquement. Nous savons que cette côte peut se transformer en cauchemar tant le vent y est puissant. Soufflant principalement en direction du nord, demain, il pourrait nous pousser. Les îles semblent ainsi se fermer à notre passage, l’appel nous invite au sud. Nous décidons de le suivre.


Nous remontons jusqu’au cap noshappu avant de plonger en direction du sud. La côte est sauvage, inhabitée. Un puissant vent nous porte. Nous volons comme des oiseaux le long de la côte. Le ciel est ténébreux et les îles de Rishiri et Rebun sont recouvertes de nuages sombres. Pas de regret, nous poursuivons au sud.


À Shosambetsu, nous plantons la tente au-dessus des falaises. La mer du Japon est nettement plus douce que celle du Pacifique ou la mer d’Okhostk. Son bleu cyan s’étire jusqu’à l’horizon. Cette fois, l’île de Rishiri et son volcan sont visibles. Il s’élève dans le ciel, puissant, indompté. L’eau est si claire qu’elle est une invitation à aller se baigner. Malgré les vagues, Nayla et Fibie se trempent vers les rochers. Puis prennent leur cerf-volant pour qu’il vole dans le ciel, savourant cet esprit de liberté.


Ce soir, le soleil se couche comme une boule rouge sur l’horizon. Il passe même dans le Torii rouge qui surgit au-dessus des vagues. Nous sommes définitivement au Japon. Nous allons ensuite dans un onsen. Face au ciel qui s’illumine de pourpre, nous nous détendons dans l’eau chaude, puis dans le sauna. Le pays du soleil levant foisonne de délicatesse.


Les teintes de l’automne commencent subrepticement à apparaître, surtout dans les contrastes des couleurs et dans le ciel bleu saphir des journées ensoleillées. Nous reprenons la route dans des montées et descentes, où les camions roulent à grande vitesse. Je ne suis pas tranquille, alors nous essayons de nous décaler au maximum afin protéger Nayla et Fibie. Ma selle me fait encore souffrir, je me réjouis aussi qu’elle soit pleinement formée. Nous avons pourtant une nouvelle destination, une petite île perdue au cœur de la mer du Japon.


                                    Céline, Xavier, Nayla et Fibie



_______________________________________

Incarnons ensemble le Changement:

Boutique:

Inscription au blog et/ou à la newsletter:

Suivez-nous également sur:

Commentaires

autre articles

Petit retour sur notre virée en Suisse

Un besoin profond de retrouver les siens, de se reconnecter à une terre de souvenirs, et de faire face à des réalités aussi bien personnelles qu’administratives. Entre retrouvailles, moments simples, nature retrouvée et épreuves physiques, ce passage devient une parenthèse précieuse, pleine d’émotions. Un passage en Suisse s’est imposé. Tout d’abord en nous. Après 2 ans, un élan nous poussait à retrouver les personnes chères à notre cœur. J’avais aussi besoin de revenir en Suisse, après l’envol de mon Papa, de retrouver sa terre, de sentir les odeurs, de me relier aux traces restantes de son passage dans ce monde physique. Et bien sûr de revoir ma Maman, de pouvoir l’embrasser, d’être présente. Les obligations administratives ont apporté la dernière touche pour transformer cet élan en une réalité. Notre avion part le 1er janvier du Japon. Nous sommes alors à Nara dans la maison d’hôte de Tatsuno San, le fondateur de Montbell. Dans l’archipel nippon, la nouvelle année est célébrée le...

Les célèbres poteries d’Inuyama

Inuyama est connu pour la qualité de ces poteries et pour leurs motifs particuliers. La production de poteries date des années 1680 déjà. Nous allons à l’atelier Goto Poterie, où un maître de plus de 70 ans y travaille encore. Descendant d’une famille de potiers depuis plus de 5 générations, son fils perpétue cette longue tradition d’artisans et d’artistes. -   Suivre ce blog  - Le maître, ce grand homme au regard franc, a beaucoup d’humour. Il nous explique d’abord comment préparer l’argile et le rendre mou afin de pouvoir le travailler. Leur atelier ayant été construit à côté d’une gigantesque montagne d’argile, ils extraient l’argile à l’endroit même. Il nous explique ensuite le processus pour terminer la poterie, environ une semaine pour sécher : une première cuisson à 800 °C pendant 8 heures, puis une deuxième cuisson à 1250 °C durant 28 heures. La décoration de la glaçure permet de mettre en valeur les motifs célèbres d’Inuyama le unkinde, le mariage des feuilles d’é...

On ne savait pas si nos jambes suivraient

Nous croyions que cette journée au bord du lac Towada serait paisible. Et pourtant… une question lancée à la volée a tout changé : « Et si on montait jusqu’aux volcans ? » En moins de deux heures, nous étions sur nos vélos, prêts à grimper cols et sommets, à travers forêts, torrents et névés surprenants. On ne savait pas encore si la météo tiendrait, ni si nos jambes suivraient. Mais quelque chose nous poussait à tenter l’aventure… Une petite route nous emmène au cœur des montagnes. Dans la végétation luxuriante, nous grimpons un kilomètre après l’autre. Ce chemin nous guide vers un petit passage, un col pour rejoindre le lac Towada. L’effort est intense, mais le chant des cigales et celui des oiseaux nous offrent un peu de réconfort. J’aime la musique de la nature, qui entrecoupe le profond silence. Les deux me permettent de rejoindre un espace de sérénité, où tout s’apaise en moi. Après un dernier passage raide, nous arrivons au col. Le bleu roi du lac se dévoile au centre des mont...

Famille d’accueil à Minoh

Depuis le lac Biwa, nous roulons jusqu’à Minoh. 80 kilomètres dans un froid mordant, avec un vent de face. Nous n’arrivons jamais à réellement nous réchauffer. Le froid devient de plus en plus pesant. Nos corps commencent à être fatigués, nous sentons la neige arriver et avec elle, l’envie de mettre les skis. 80 km c’était un peu trop. Mais il n’y avait plus d’alternative au moment où nous le réalisons. Et ainsi nous arrivons avec les dernières lueurs du jour dans notre famille d’accueil de HIPPO pour notre conférence qui a lieu dans 2 jours. Chihiro nous accueille avec ces trois enfants Renka, Rin et Ram. Sportives et pleines d’énergie, les filles s’entendent à merveille. Le lendemain, nous allons voir la chute d’eau de Minnoh, longeons la rivière cristalline qui nous emmènent vers de magnifiques bâtiments en bois. Cette montagne est sacrée et fait partie du culte du bouddhisme Shugendo. Nous marchons ainsi dans ce lieu sacré recouvert de forêts et découvrons la chute d’eau de 33 m...

Sur les sentiers sacrés de Yamagata

Nous plongeons au cœur d’une nature intense, où la rivière Mogami-gawa déchaîne ses forces et les montagnes révèlent leurs secrets. Chaque instant est une découverte, un mélange d’émotions, de rencontres et de traditions vibrantes. Le chemin nous guide le long d’une piste cyclable qui longe la rivière Mogami-gawa. Nous sommes impressionnés par la puissance du courant, des rapides et remous. L’eau est tumultueuse, et pourtant turquoise. Le niveau est particulièrement élevé. Les larges lits dans ce pays sont souvent traversés par plusieurs bras et cours d’eau, laissant la place pour les crues rapides. Pourtant cette fois, le lit est complètement recouvert et les premiers arbres de la berge sont même sous le flot. C’est phénoménal ! Imaginer le débit est presque impossible ! L’eau provient encore de la neige qui continue de fondre. Cette année, plus de 5 mètres sont tombés ! Et alors que nous admirons le caractère sauvage de ce fleuve, le mont Gassan apparaît soudain. Large, ce volcan ...

De passage en Suisse

  De passage en Suisse pour quelques semaines nous partagerons 3 conférences: "Spécial Japon"   Le Japon nous conduit au cœur de ses légendes et traditions  à travers 45 des 47 préfectures et sur plus de 20 '000 km. C'est ainsi que certaines des terres les plus mystérieuses du Japon nous ont été révélées. Et c'est parce que nous explorons le monde à la force de notre propre corps, depuis 15 ans, que nous avons été nommé  Japan Eco Track  Ambassadeur.   Bienvenue et au plaisir de te revoir Toutes les informations: ici Céline, Xavier, Nayla et Fibie -   Suivre ce blog  - _______________________________________ Incarnons ensemble le Changement: Etre créateur de nos Vies Boutique: Cartes / livres / photographie Inscription au blog et/ou à la newsletter: Inscription Suivez-nous également sur: www.ylia.ch instagram youtube facebook

Elles ont traversé le Japon… un coup de pédale après l’autre

Sous la lumière douce de la lune et le crépitement des braises, une simple soirée barbecue s’est transformée en une plongée inattendue dans le monde secret des alpinistes japonais et des amitiés sincères. Ce chemin à vélo à travers les 47 préfectures du Japon n’est pas qu’un défi sportif : c’est une traversée de cimes, de rencontres inoubliables et d’émotions brutes. Une odyssée où chaque virage, chaque col, chaque repas partagé éclaire un peu plus le sens de notre aventure.  À la lueur de la lune et des braises ardentes d’un barbecue, nous partageons la soirée avec Saya, Junji, Lisa et Kenji. Ibuki et Reiji, deux garçons de 4 et 2 ans sont en train de courir et jouer avec les filles. C’est la deuxième fois que nous rencontrons la famille de Saya et Junji. Ils nous avaient déjà accueillis lors de notre passage à Yamagata en 2023. Saya était alors enceinte de 7 mois. Cette fois, nous rencontrons pour la première fois Reiji, et découvrons leur nouvelle maison rénovée. Cela fait 2 ans...

Au rythme du vent et des rencontres

Nous reprenons la route, sacoches chargées, cœurs ouverts, prêts à affronter la pluie, les kilomètres et l’inconnu. Chaque détour nous offre une rencontre inattendue, chaque étape devient une aventure, entre gratitudes, défis et retrouvailles vibrantes. C’est à nouveau le grand départ. Demain, nous reprenons la route. Et comme à chaque fois que tout est nettoyé et propre, une pluie abondante est annoncée pour toute la journée... on espère passer à côté des gouttes, mais nous savons bien que nous serons détrempés. C’est presque un clin d’œil de la Vie, combien de fois sommes-nous repartis sous des pluies diluviennes. Nous en rions, même si nous nous sentons comme des chats qui à l’abri dans un cocon douillet, n’ont pas envie de mouiller leur pelage. On s’inquiète pour nous, Kiyoko San, la femme de Tatsuno San, fondateur de Montbell, chez qui nous sommes invités à Manyoso, a envie de nous aider. Nous devons récupérer notre matériel resté à Osaka et reprendre la route en direction de ...