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En route pour les montagnes



Après avoir monté le camp, la douce brise qui amenait un minimum d’air s’est définitivement éteinte, nous laissant dans une humidité étouffante. Les orages nous obligent à monter la toile extérieure et la tente se transforme en véritable sauna. Même la nuit, nous ne pouvons pas stopper la transpiration excessive qui nous épuise. Ces derniers jours, nous buvons plus de 7 litres d’eau par jour et par personnes, pour Xavier et moi, afin de pouvoir compenser l’eau que nous perdons. Nous prenons alors du Nigari, composé de magnésium, pour compenser la perte de minéraux. Alors lorsque le lendemain nous commençons la journée en nous sentant déjà déshydratés par la nuit, c’est difficile. Surtout que nous entamons un col. 800 m de dénivellations dans des montées - décentes qui n’en finissent plus. J’ai l’impression d’avoir été essorée, tellement d’eau s’est écoulée de mon corps.

Ce n’est même plus de la transpiration à ce stade, par moment c’est une flaque d’eau que nous laissons derrière nous après un arrêt de 10 minutes. Nos vêtements ainsi que nos chaussures sont aussi détrempés que si nous étions passés dans un déluge. Nous sommes littéralement vidés de toute notre eau, et il n’y a aucun moyen de mettre pause, de diminuer l’intensité. En plein soleil, dans les montées, le corps subit. Surtout que nous ne trouvons pas de lieu où dormir. Je commence à avoir mal à la tête, mon corps est épuisé. Pour les filles aussi c’est dur. L’intensité de l’effort est inimaginable et nous ne savons pas quand l’été va nous offrir un peu de répit. Soudain, notre ami photographe de Miyazaki nous rejoint. Il nous apporte des boissons fraîches et son fils souhaite faire quelques kilomètres à vélo avec nous. Nous acceptons avec plaisir, et quelques kilomètres plus loin découvrons finalement un petit coin pour planter la tente. Après avoir joué avec Nayla et Fibie, ils repartent les yeux lumineux, nous laissant à notre routine quotidienne. Heureusement, ce soir l’altitude amène une pointe de fraîcheur. Le thermomètre est juste en dessous de 30°C. 


Une fois encore, les montagnes nous appellent. Lentement, nous suivons la rivière Gokase qui entre de plus en plus profondément dans les entrailles de la Terre. Nous rencontrons des personnes âgées le long du chemin, dont l’accent nous surprend. Il devient difficile de comprendre ce japonais, alors que nous commencions à maîtriser les premières salutations. Pourtant, les gens sont incroyablement souriants et généreux. Et chaque jour, nous recevons une boisson fraîche parfois des glaces pour lutter contre la chaleur étouffante. Lorsque nous le pouvons, nous profitons de nous baigner dans l’eau limpide de la rivière. Pourtant, elle creuse de plus en plus profondément la terre et bientôt transforme les paysages en gorges spectaculaires que nous longeons. Trop heureux d’emprunter cette petite route sans circulation au panorama sensationnel, nous nous trouvons face à un panneau rouge. Le pont, quelques kilomètres plus loin, a été totalement détruit pas un glissement de terrain. Nous devons rejoindre la route principale avec un petit col à plus de 10 % sur 2 km. Nous décidons de camper sous un grand arbre et de poursuivre le lendemain. 


Le matin, il nous reste encore 500 m de dénivellation pour atteindre le col qui nous emmène vers une des plus grandes caldeiras au monde, celle du volcan Aso. Nous luttons toujours autant physiquement, mais notre esprit s’évade. Les paysages sont incroyables. De petits villages apparaissent dans ces montagnes tapissées de forêts ou de rizières en terrasse vertes lumineuses. Les montagnes s’élèvent toujours plus haute et donne des panoramas spectaculaires. Il n’y a aucun doute, l’effort vaut les somptueux paysages qui se dessinent face à nous. Même si chaque coup de pédale nous rappelle la chaleur étouffante ainsi que les 120 kg que nous traînons en haut des montagnes. Cela ne nous empêche pas non plus de transporter un petit jardin. Des graines germées que nous faisons pousser le long du chemin ! 


Nos corps subissent la chaleur de cet été et nos vélos aussi s’usent. C’est le moment de changer quelques pièces. Nos petites vitesses sautent et il n’est plus possible de les utiliser. Xavier doit donc faire le col avec la quelque vitesses en moins. Après plus de 17’000 km, les dents sont complètement usées. Notre première mission, une fois arrivés à Aso, sera de nous occuper de nos montures. 


Finalement, nous arrivons au col avec la vue sur le mont Aso. Une fois encore, nous venons de rejoindre les volcans. 



Céline, Xavier, Nayla et Fibie
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