Accéder au contenu principal

Un autre regard sur le Japon

 

Les premiers bâtiments de la ville de Sapporo se dessinent. Nous entrons dans la capitale d’Hokkaido. Nous sommes invités à rester quelques jours chez Hiro, dans un petit appartement traditionnel. Nous sommes reconnaissants pour ces quelques jours de pause. Nos corps en ont réellement besoin. Cela fait aussi des jours que nous courons après l’électricité afin de pouvoir rédiger les divers articles pour les magazines et Japan Eco Track. Cela nous offre un peu de répit. 


Hiro nous emmène dans un Izikaya, une sorte de pub japonais. Nous dégustons alors des spécialités locales dont du riz au thé vert, des patates douces sucrées au miel et des brochettes. Nous prenons surtout le temps d’échanger avec cet homme passionnant. Écrivain, il nous explique certains des problèmes actuels du Japon. Il y a bien sûr une société vieillissante. Surtout, une population dont tout le savoir-faire en agriculture est tenu à 95 % par des personnes âgées à la retraite. Nous avons déjà pu l’observer. Il n’y a plus de jeunes dans les champs. Comment la jeune génération apprendra à planter le riz ou récolter les pommes de terre et les fruits ? 


Intéressé par la situation avec les personnes handicapées, Hiro nous confirme ce que nous ressentons. L’identité d’un individu passe au Japon par son travail. Sans emploi, la personne perd son identité et sa place dans la société. Les personnes handicapées ou malades deviennent presque anonymes, et reçoivent très peu de soutien de la part du gouvernement. Ce sont généralement les familles qui doivent alors subvenir aux besoins de ces personnes. 


Nous parlons alors de discriminations. Nous tombons logiquement sur la situation particulière d’Hokkaido. Nous avons toujours eu la sensation qu’il y avait une énergie différente sur cette île, sans parlé de son écosystème et de l’architecture des villes par exemple. Hiro nous le confirme, Hokkaido a 200 ans contre 2000 ans d’histoire japonaise à Honshu. Avant, Hokkaido était une île indépendante peuplée par la population Ainu, un peuple autochtone aux traditions animistes. L’interdiction de pratiquer les rituels, de parler la langue, l’obligation de s’assimiler à la culture japonaise et la discrimination a conduit les Ainu à cacher leur véritable identité. Et aujourd’hui encore, certains se taisent, malgré la volonté du gouvernement japonais de raviver la culture. 


Nous entrons au cœur de certaines problématiques complexes dont le Japon doit faire face. Nous comprenons cette énergie puissante qui nous porte à Hokkaido. Nous sentons que nous sommes dans un monde bien différent, sur une terre autre, dont les vibrations portent un souffle distinct. Nous nous sentons reliés aux énergies du Nord, à une nature puissante, à une magie qui dépasse notre entendement.

Céline, Xavier, Nayla et Fibie

_______________________________________

Inscription au blog et/ou à la newsletter:


Pour nous aider à planter des graines d'espoir

1 dollar par mois

Suivez-nous également sur:


Commentaires

autre articles

45 minutes dans un tunnel

Nous entrons en plein cœur de montagnes de l’île de Shikoku. Longeant les rivières, nous grimpons ensuite sur une longue montée de plus de 20 kilomètres qui doit nous emmener au pied de la montagne sacrée d’Ishizuchi. Soudain, nous nous trouvons face à un tunnel de plus de 5 kilomètres sans bande de sécurité. 5 kilomètres en montée, avec plus de 200 m de dénivellation, c’est plus de 45 minutes dans le tunnel en plein effort, sans possibilités de s’arrêter . « Est-ce vraiment une bonne idée ? » je demande. « Et toi, Nayla comment te sens-tu à l’idée de rouler dans ce tunnel ? » questionne Xavier. Pourtant, il n’y a pas d’autres options. Vu que le trafic est relativement faible, nous prenons notre courage à deux mains et pénétrons dans les entrailles de la Terre. 5 kilomètres c’est long ! On ne se donne pas le droit de ralentir, pour ne pas prolonger le temps dans cet espace confiné. Heureusement, le tunnel est bien ventilé et il n’y a presque pas de circulation. Toujours est-...

Retrouvailles après une nuit mouvementée

Nous sommes au bord de la tente en train de préparer un repas à base de millet et de légumes frais. La légère pluie devient de plus en plus forte. Ce ne sont plus des flaques sur la route, mais un ruissellement, le sol se gorge d’eau. Je scrute le ciel. Les éléments se déchaînent. Le vent devient violent. Les sardines lâchent. La tarpe claque et promet de se déchirer alors que le montant est tombé. Je le maintiens sous la pluie diluvienne et le vent me fouette le visage. Les bourrasques augmentent encore en puissance et nous recevons régulièrement maintenant des messages d’alertes sur notre téléphone portables. Forte pluie, vent puissant, glissements de terrain, routes fermées.  À 21 heures, la tempête bat toujours son plein et ne donne aucun signe de faiblesse. Nous savons que la nuit va être longue. Il faudra être à l’affût du moindre changement de situation. Soudain, le haut-parleur s’enclenche et une annonce bruyante résonne dans la nuit mouvementée. Quelques minutes plus tard,...

En route pour les montagnes

Après avoir monté le camp, la douce brise qui amenait un minimum d’air s’est définitivement éteinte, nous laissant dans une humidité étouffante. Les orages nous obligent à monter la toile extérieure et la tente se transforme en véritable sauna. Même la nuit, nous ne pouvons pas stopper la transpiration excessive qui nous épuise. Ces derniers jours, nous buvons plus de 7 litres d’eau par jour et par personnes, pour Xavier et moi, afin de pouvoir compenser l’eau que nous perdons. Nous prenons alors du Nigari, composé de magnésium, pour compenser la perte de minéraux. Alors lorsque le lendemain nous commençons la journée en nous sentant déjà déshydratés par la nuit, c’est difficile. Surtout que nous entamons un col. 800 m de dénivellations dans des montées - décentes qui n’en finissent plus. J’ai l’impression d’avoir été essorée, tellement d’eau s’est écoulée de mon corps. Ce n’est même plus de la transpiration à ce stade, par moment c’est une flaque d’eau que nous laissons derrière nous...

L’apprentissage fait partie intégrante de la Vie

L’école pourrait nous faire croire qu’il existe un lieu désigné et un temps pour apprendre. Elle donne l’illusion que l’apprentissage doit être coupé du reste de la Vie pour être efficace. Elle choisit qu’il faut être assis et tranquille pour intégrer les informations. Pourtant, il n’y a pas de moments plus propices que celui de l’intérêt.  Il faut en moyenne 400 répétitions pour créer une nouvelle synapse dans le cerveau, selon des recherches récentes. Et pourtant, lorsqu’il s’agit d’un jeu, il ne faut que 10 à 20 répétitions.  Il n’y a pas, non plus, de lieux impossibles, assis sur le bord d’un trottoir en attendant le train, dans le bus bondé, à califourchon sur une branche d’un arbre, ou dans un café hyper bruyant.  Nous le savons tous bien, l’apprentissage se poursuit tout au long de notre existence. C’est ce qui nous rend vivants, c’est la découverte, l’exploration, la compréhension, l’expérimentation. Ce n’est pas s’asseoir devant une feuille de papier avec un cray...

Nouveaux itinéraires à vélo

Derrière la gigantesque ville d’Hiroshima, qui se présente comme un symbole de paix, la rivière Ota nous conduit au cœur des montagnes. Elle se faufile entre les arrêtes plongeantes, entre les parois abruptes recouvertes de denses forêts. Avec la pluie, de la brume entoure les sommets et leur donne un caractère mystique. La route par moment est étroite, creusée entre la falaise et la rivière. Nous nous sentons portés à aller encore plus loin pour découvrir la magie de ces lieux. De retour à Akiota, nous retrouvons sa beauté, alors que les arbres commencent à se parer des couleurs flamboyantes de l’automne. Une douce sensation d’émerveillement nous accueille. Sur nos vélos, nous explorons alors les petites routes sinueuses de la région pour découvrir de nouveaux itinéraires. Elles nous emmènent dans des vallées étroites qui traversent les montagnes. Elles rejoignent les cols pour offrir le spectacle de panoramas enivrants . Elles suivent les torrents et les rivières à l’eau cristalli...

14 ans à créer notre vie au cœur du vivant

Cela fait 14 ans que nous avons enfourché nos vélos pour partir sur les routes du monde. Aujourd’hui, nous ne le vivons plus comme un voyage, mais comme une manière de vivre, qui est alignée avec nos convictions profondes. Nous avons choisi d’honorer les lois du vivant, dans un monde en interconnexion constante avec chaque étincelle de vie. Ainsi dans une vision que certains pourraient appeler animiste, nous nous relions aux esprits des lieux et des éléments, des montagnes et des rivières et des animaux. Nous acceptons de faire partie du tout, nous acceptons que chacune de nos actions ont un impact sur le vivant. Au Japon, les anciennes traditions d’Okinawa sont reliées à cette vision du monde. Habitant sur de petites îles dans le Pacifique, la relation à leur environnement est très forte, imbriquée à leur mode de vie et manière d’être. Les typhons appellent évidemment à la résilience, et certainement à ce respect d’une force naturelle auquel le respect est dû.  Pour nous, les dern...

Le froid s'installe

Les couleurs qui parent les arbres sont le signe manifeste de l'automne qui s'installe. Ces nuances vives et flamboyantes transforment les forêts qui s'étalent à perte de vue. Du vert intense, les montagnes sont maintenant des tableaux chatoyants. C 'est aussi la saison des kakis qui illuminent les branches de leur orange vif. Ils sont délicieusement onctueux. Les anciennes variétés, largement répandues dans les villages de montagnes, ne peuvent être mangées directement. Ils sont séchés afin de supprimer leur âpreté. Cela les rend encore plus sucrés. L'automne, c'est cette saison lumineuse avec ces teintes chaleureuses, mais c'est aussi le moment où les journées sont de plus en plus courtes. Pour nous qui sommes toujours dehors, ce sont les longues soirées sous tente dans la nuit noire. Et les températures qui diminuent de jour en jour. L’automne nous porte par ces couleurs, mais impose un retour sur nous. Nous sommes moins poussés à la découverte et pl...

De la pluie glacée à un accueil chaleureux

Au cœur des montagnes, nous repartons pour les prochaines montées. En fin de journée, nous rejoignons un Michi no Eki (une air de repos) dans lequel nous pouvons manger à l’intérieur. Ce n’est pas chauffer, mais au moins c’est à l’abri du vent. En se baladant vers le village, Nayla y découvre une bibliothèque! En plus, elle est ouverte. C’est le cadeau de la journée. Des livres dans une douce chaleur! Une première, nous nous sentons infiniment reconnaissants. Au petit matin, nous repartons et cette fois le temps joue avec notre moral. De la pluie glacée nous mouille à tout moment, avant que le soleil ne revienne. À chaque fois, cette douche froide imprègne nos corps, mais surtout notre courage. Heureusement, un moine shintoïste nous accueille dans son sanctuaire. Il y met le chauffage et nous pouvons nous réchauffer. Fibie a les pieds rouges jusqu’à la plante. C’était le moment. Nous repartons encore dans les montées, les jambes sifflantes, mais les paysages nous portant au-delà, ver...