Accéder au contenu principal

A nouveau sur les routes

Ce matin, je me lève avec le chant des oiseaux et celui de la rivière, dans un air chaud et doux. Le rayon de soleil qui caresse la tente jaune est une invitation à débuter la journée. Il illumine aussi l’espace vert qui nous entoure et lui donne un air de sanctuaire. Le grand épicéa domine le lieu et a pris le rôle du grand protecteur. Le mélèze accueille les oiseaux. La forêt se déploie en arrière-fond, comme une toile vivante. Le petit ruisseau lui est joyeux. J’aime sa légèreté, ce filet d’eau qui s’écoule dans un éclat de vie. Il me fait penser à l’énergie d’un jeune enfant, cet élan sans limites, cette allégresse. L’air apporte les odeurs de la rosée. Pourtant la luminosité se transforme. Quelques nuages s’attroupent. En quelques secondes, c’est le déluge. Des trombes d’eau se déversent bruyamment. Cette météo fait écho à ce que nous vivons intérieurement. Ce matin, c’est le vrai départ. Cette fois, nous partons dans l’inconnu. Pourtant, il ne prend pas les lignes d’un départ, mais plutôt d’une parenthèse qui se termine. Ces quelques mois en Suisse, nous étions dans un équilibre qui était centré sur les autres, sur le partage de nos expériences de vie. C’était aussi toutes ces parties d’identité qui faisaient surface et résonnaient en nous, comme si chaque lieu illuminait une partie de nous. Comment alors réussir à ne pas nous relier uniquement à cette identité si vibrante ? Comment réussir à sentir que toutes ces parties et bien d’autres encore créent ce que nous sommes aujourd’hui ? Comment toutes les unifier ? Et finalement rester soi, au-delà ces facettes ravivées, au-delà de ceux qui nous aiment inconditionnellement ou conditionnellement, au-delà de ceux qui nous mettent sur un piédestal ou ceux qui nous jugent ?  




Ce matin, il a le goût non pas du départ, mais d’un renouveau dans la poursuite de notre vie nomade. Comme une étincelle de joie et d’excitation à l’idée de reprendre notre manière de vivre. Le retour à notre plongeon quotidien dans l’inconnu nous apaise au lieu de nous inquiéter. L’appel des lieux n’est pas encore clair, mais il se clarifiera en chemin. Là, c’est l’appel de notre vie sous tente, en interconnexion à la nature qui nous invite. Et le rayon de soleil de ce matin en était le symbole. Ce déluge, c’est en même temps toutes les émotions qui nous habitent. Nous sommes dans les au revoir, aussi dans cette séparation par moment douloureuse avec ceux que nous aimons, avec ces moments que nous pouvons passer ensemble, avec cette proximité qui rassure. Ce qui nous manque le plus dans les relations à distance sont les touchers, « les câlins » diront les filles, tous ces moments la connexion passe par le corps. Ce sont aussi ces moments où l’on se dit parce que l’espace est propice, parce que dans le silence nous avons besoin de nous dire. Ce matin, c’est le grand départ ! 


 Céline, Xavier, Nayla et Fibie

___________________________________________


Inscription au blog et/ou à la newsletter:


Envie de nous offrir un café:


Suivez-nous également sur:

Commentaires

autre articles

45 minutes dans un tunnel

Nous entrons en plein cœur de montagnes de l’île de Shikoku. Longeant les rivières, nous grimpons ensuite sur une longue montée de plus de 20 kilomètres qui doit nous emmener au pied de la montagne sacrée d’Ishizuchi. Soudain, nous nous trouvons face à un tunnel de plus de 5 kilomètres sans bande de sécurité. 5 kilomètres en montée, avec plus de 200 m de dénivellation, c’est plus de 45 minutes dans le tunnel en plein effort, sans possibilités de s’arrêter . « Est-ce vraiment une bonne idée ? » je demande. « Et toi, Nayla comment te sens-tu à l’idée de rouler dans ce tunnel ? » questionne Xavier. Pourtant, il n’y a pas d’autres options. Vu que le trafic est relativement faible, nous prenons notre courage à deux mains et pénétrons dans les entrailles de la Terre. 5 kilomètres c’est long ! On ne se donne pas le droit de ralentir, pour ne pas prolonger le temps dans cet espace confiné. Heureusement, le tunnel est bien ventilé et il n’y a presque pas de circulation. Toujours est-...

Retrouvailles après une nuit mouvementée

Nous sommes au bord de la tente en train de préparer un repas à base de millet et de légumes frais. La légère pluie devient de plus en plus forte. Ce ne sont plus des flaques sur la route, mais un ruissellement, le sol se gorge d’eau. Je scrute le ciel. Les éléments se déchaînent. Le vent devient violent. Les sardines lâchent. La tarpe claque et promet de se déchirer alors que le montant est tombé. Je le maintiens sous la pluie diluvienne et le vent me fouette le visage. Les bourrasques augmentent encore en puissance et nous recevons régulièrement maintenant des messages d’alertes sur notre téléphone portables. Forte pluie, vent puissant, glissements de terrain, routes fermées.  À 21 heures, la tempête bat toujours son plein et ne donne aucun signe de faiblesse. Nous savons que la nuit va être longue. Il faudra être à l’affût du moindre changement de situation. Soudain, le haut-parleur s’enclenche et une annonce bruyante résonne dans la nuit mouvementée. Quelques minutes plus tard,...

L’apprentissage fait partie intégrante de la Vie

L’école pourrait nous faire croire qu’il existe un lieu désigné et un temps pour apprendre. Elle donne l’illusion que l’apprentissage doit être coupé du reste de la Vie pour être efficace. Elle choisit qu’il faut être assis et tranquille pour intégrer les informations. Pourtant, il n’y a pas de moments plus propices que celui de l’intérêt.  Il faut en moyenne 400 répétitions pour créer une nouvelle synapse dans le cerveau, selon des recherches récentes. Et pourtant, lorsqu’il s’agit d’un jeu, il ne faut que 10 à 20 répétitions.  Il n’y a pas, non plus, de lieux impossibles, assis sur le bord d’un trottoir en attendant le train, dans le bus bondé, à califourchon sur une branche d’un arbre, ou dans un café hyper bruyant.  Nous le savons tous bien, l’apprentissage se poursuit tout au long de notre existence. C’est ce qui nous rend vivants, c’est la découverte, l’exploration, la compréhension, l’expérimentation. Ce n’est pas s’asseoir devant une feuille de papier avec un cray...

En route pour les montagnes

Après avoir monté le camp, la douce brise qui amenait un minimum d’air s’est définitivement éteinte, nous laissant dans une humidité étouffante. Les orages nous obligent à monter la toile extérieure et la tente se transforme en véritable sauna. Même la nuit, nous ne pouvons pas stopper la transpiration excessive qui nous épuise. Ces derniers jours, nous buvons plus de 7 litres d’eau par jour et par personnes, pour Xavier et moi, afin de pouvoir compenser l’eau que nous perdons. Nous prenons alors du Nigari, composé de magnésium, pour compenser la perte de minéraux. Alors lorsque le lendemain nous commençons la journée en nous sentant déjà déshydratés par la nuit, c’est difficile. Surtout que nous entamons un col. 800 m de dénivellations dans des montées - décentes qui n’en finissent plus. J’ai l’impression d’avoir été essorée, tellement d’eau s’est écoulée de mon corps. Ce n’est même plus de la transpiration à ce stade, par moment c’est une flaque d’eau que nous laissons derrière nous...

Nouveaux itinéraires à vélo

Derrière la gigantesque ville d’Hiroshima, qui se présente comme un symbole de paix, la rivière Ota nous conduit au cœur des montagnes. Elle se faufile entre les arrêtes plongeantes, entre les parois abruptes recouvertes de denses forêts. Avec la pluie, de la brume entoure les sommets et leur donne un caractère mystique. La route par moment est étroite, creusée entre la falaise et la rivière. Nous nous sentons portés à aller encore plus loin pour découvrir la magie de ces lieux. De retour à Akiota, nous retrouvons sa beauté, alors que les arbres commencent à se parer des couleurs flamboyantes de l’automne. Une douce sensation d’émerveillement nous accueille. Sur nos vélos, nous explorons alors les petites routes sinueuses de la région pour découvrir de nouveaux itinéraires. Elles nous emmènent dans des vallées étroites qui traversent les montagnes. Elles rejoignent les cols pour offrir le spectacle de panoramas enivrants . Elles suivent les torrents et les rivières à l’eau cristalli...

14 ans à créer notre vie au cœur du vivant

Cela fait 14 ans que nous avons enfourché nos vélos pour partir sur les routes du monde. Aujourd’hui, nous ne le vivons plus comme un voyage, mais comme une manière de vivre, qui est alignée avec nos convictions profondes. Nous avons choisi d’honorer les lois du vivant, dans un monde en interconnexion constante avec chaque étincelle de vie. Ainsi dans une vision que certains pourraient appeler animiste, nous nous relions aux esprits des lieux et des éléments, des montagnes et des rivières et des animaux. Nous acceptons de faire partie du tout, nous acceptons que chacune de nos actions ont un impact sur le vivant. Au Japon, les anciennes traditions d’Okinawa sont reliées à cette vision du monde. Habitant sur de petites îles dans le Pacifique, la relation à leur environnement est très forte, imbriquée à leur mode de vie et manière d’être. Les typhons appellent évidemment à la résilience, et certainement à ce respect d’une force naturelle auquel le respect est dû.  Pour nous, les dern...

De la pluie glacée à un accueil chaleureux

Au cœur des montagnes, nous repartons pour les prochaines montées. En fin de journée, nous rejoignons un Michi no Eki (une air de repos) dans lequel nous pouvons manger à l’intérieur. Ce n’est pas chauffer, mais au moins c’est à l’abri du vent. En se baladant vers le village, Nayla y découvre une bibliothèque! En plus, elle est ouverte. C’est le cadeau de la journée. Des livres dans une douce chaleur! Une première, nous nous sentons infiniment reconnaissants. Au petit matin, nous repartons et cette fois le temps joue avec notre moral. De la pluie glacée nous mouille à tout moment, avant que le soleil ne revienne. À chaque fois, cette douche froide imprègne nos corps, mais surtout notre courage. Heureusement, un moine shintoïste nous accueille dans son sanctuaire. Il y met le chauffage et nous pouvons nous réchauffer. Fibie a les pieds rouges jusqu’à la plante. C’était le moment. Nous repartons encore dans les montées, les jambes sifflantes, mais les paysages nous portant au-delà, ver...

Les légendes mystérieuses du Japon

Perdus dans une petite vallée d’Akiota, nous rejoignons un festival local. Là, dans un sanctuaire shintoïste, une représentation de Kagura va durer toute la nuit.  Assis sur le sol et recouverts de couverture, grands, petits et bébés assistent à cette dance rituelle. Le kagura est une combinaison de danses dramatiques accompagnées par un groupe de musiciens. Sur le son des Taiko et des flûtes, les comédiens vêtus de masque et de costume incroyables racontent les légendes mystiques du pays, où généralement les guerriers combattent des oni, les démons. Nous assistons ainsi à cette tradition unique. Nous sommes tout d’abord accueillis par le leader de la troupe. Il nous propose de nous asseoir auprès des jeunes qui spontanément invitent Nayla et Fibie dans leur groupe. L’ambiance est joviale et animée. Les histoires font rires petits et grands. Même si nous ne comprenons pas tout, nous rions des mimiques et des danses qui rendent les personnages vivants. Soudain, un nuage de fumée bl...