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De retour vers Kyushu


Deux heures après être rentré de la chasse au serpent, Fibie vomit soudainement. Puis c’est à mon tour. Nous avons une intoxication alimentaire. Le tofu que nous avons mangé n’était pas assez frais. Impensable de rester dans la tente, nous nous allongeons ainsi à la belle étoile, dans la chaleur étouffante de plus de 30 °C. Impossible de boire alors que notre corps continue de ressortir le poison que nous avons ingurgité. La seule récompense est la nuit incroyablement étoilée, alors que les météorites dessinent des traces lumineuses dans le ciel. À chaque étoile filante, je souffle un vœu de plus pour l’équilibre et l’harmonie sur mes terres intérieures, autant que celles planétaires. Le lendemain, nous rampons sous un soleil de plomb, continuant de vomir, affaiblit et courbaturé. Fibie souligne tout de même : « tu vois Maman, j’arrive à faire un jeune ! Ce n’est pas impossible pour les enfants. » dit-elle couchée dans l’herbe qui elle l’espère lui amène un peu de fraîcheur, mais aussi intuitivement pour se connecter aux énergies de la Terre. C’est la grande purification, nous sommes complètement vidés. Il nous faut tout de même attendre 17 heures pour pouvoir monter sur le ferry. Nous faisons de grands signes d’au revoir à Massahiro et sa famille, les larmes aux yeux de la rencontre avec l’énergie incroyable de cet homme et de la générosité de sa famille. Puis nous nous effondrons sur les tatamis. 

Au petit matin, nous sommes à Kyushu. Le corps faible pour Fibie et moi, nous roulons dans la ville. Je suis alors surprise de me rendre compte à quel point les cigales chantent fort. Nayla me rappelle alors ce qu’elle a appris sur le chant des oiseaux qui devient de plus en plus strident alors que le niveau sonore des villes augmente. Cela me rappelle une fois encore l’interconnexion de notre monde. Cela doit être aligné sur les énergies du moment, vu qu’ici au Japon, c’est la fête de la montagne, Yama no hi, un jour férié. Instauré en 2016 par la législature, l’idée est de rendre hommage aux sommets et à leur esprit. C’est non seulement une invitation à rejoindre les montagnes et apprendre à les connaître, ce qui est primordial dans un monde où de plus en plus de parents n’ont plus aucune expérience de la nature, vivant uniquement dans un monde transformé et « civilisé » par l’humain, c’est à dire, un lieu où la nature tant à être évincée de chaque recoin. Mais plus encore, il y a cette pensée animiste qui pour ma part, souligne cette interdépendance, cette relation au tout que notre anthropocentrisme néglige et détourne ou pire méprise et déserte.


Quelques heures plus tard, nous avons une conférence avec l’association HIPPO (https://www.lexhippo.gr.jp/), qui promeut l’apprentissage naturel de la langue. Heureusement, les quelques jeux ont mis Fibie dans une énergie un peu plus légère. Puis nous nous retrouvons face à un gigantesque barbecue dans le jardin somptueux de la maison traditionnelle familiale de Ryuma Kojima San à Makurazaki. Nous plongeons aussi subrepticement dans les énergies de la Seconde Guerre mondiale. Non loin d’ici, se trouve la base Chiran, là où les jeunes japonais se sont transformés en Kamikaze, les vents divins, pour sauver la patrie. Il y a là-bas les dernières lettres, photographies et histoires de ces jeunes. Et pas la peine d’aller si loin. Ryuma San nous explique qu’une bombe à exploser à l’endroit même où nous mangeons, et nous montre ensuite les marques des impacts de balles sur les charpentes de la maison. De retour à notre barbecue, nous retrouvons la famille Sato, Sunao, le mari s’occupe de surveiller et prédire les éventuelles explosions du volcan Sakurajima, en analysant notamment les tremblements de terre. Sa femme Chiaki, elle s’occupe des prédictions météorologiques. Et Hitane leur petit garçon de 2 ans s’amuse à cœur joie avec les filles. 

Finalement, nous restons quelques jours dans la maison, nous permettant aussi de pouvoir récupérer physiquement de notre intoxication alimentaire, surtout avec la chaleur intense qui règne ces derniers temps. Nous allons nager dans la mer, et même si Fibie se fait légèrement piquer par une méduse, l’eau reste toujours une source de bien-être et de joie, tout comme les châteaux de sable.


Au Japon, c’est aussi la période Obon, l’hommage aux ancêtres ainsi qu’aux personnes récemment décédées. Obon célèbre particulièrement les morts d’il y a 1 an, 3 ans, 7 ans, 11 ans, 17 ans, 33 ans et 50 ans. Ryuma San va ainsi prier pour ses ancêtres. Dans chaque maison, il y a un autel shinto et un lieu pour les prières bouddhistes. Chaque matin et chaque soir, notre hôte place un peu d’eau fraîche pour sa lignée. Avant de partir, nous faisons aussi une prière devant le temple familial pour nous offrir la protection. Et c’est avec émotion que nous reprenons la route dans le sud de Kyushu. 


Céline, Xavier, Nayla et Fibie
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