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45 minutes dans un tunnel

Nous entrons en plein cœur de montagnes de l’île de Shikoku. Longeant les rivières, nous grimpons ensuite sur une longue montée de plus de 20 kilomètres qui doit nous emmener au pied de la montagne sacrée d’Ishizuchi. Soudain, nous nous trouvons face à un tunnel de plus de 5 kilomètres sans bande de sécurité. 5 kilomètres en montée, avec plus de 200 m de dénivellation, c’est plus de 45 minutes dans le tunnel en plein effort, sans possibilités de s’arrêter . « Est-ce vraiment une bonne idée ? » je demande. « Et toi, Nayla comment te sens-tu à l’idée de rouler dans ce tunnel ? » questionne Xavier. Pourtant, il n’y a pas d’autres options. Vu que le trafic est relativement faible, nous prenons notre courage à deux mains et pénétrons dans les entrailles de la Terre. 5 kilomètres c’est long ! On ne se donne pas le droit de ralentir, pour ne pas prolonger le temps dans cet espace confiné. Heureusement, le tunnel est bien ventilé et il n’y a presque pas de circulation. Toujours est-
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La montagne sacrée d’Ishizuchi

Après la purification de nos impuretés sous la chute d’eau selon les pratiques du Shugendō, nous sommes autorisés à gravir la montagne spirituelle d’Ishizuchi selon cette tradition. Nous prenons ainsi nos vélos sur plus de 10 kilomètres. Fibie est partante pour le défi et enfourche sa monture . Nous longeons la vallée creusée par une rivière à l’eau turquoise. Elle est si claire que l’on peut y découvrir les poissons qui y vivent. Arrivés au pied de la montagne, le téléphérique nous emporte dans les nuages qui recouvrent les sommets. Nous commençons ensuite cette longue marche. Nous avons encore 700 mètres de dénivellation à gravir sur 4 kilomètres. Après 20 minutes d’effort, nous allons prier les Tengu et l’esprit de la montagne sacrée dans les premiers temples. Puis nous poursuivons le long de l’arrête. Les Yamabushis, les moines suivant les pratiques ascétiques du culte des montagnes, utilisent des voies particulièrement aériennes pour gravir la montagne . Certains passages sont au

Une cérémonie bien particulière

Le temple Gokurakuji est situé au pied au mont Ishizuchi, une montagne sacrée. Son fondateur En No Gyoja (634-701) a pratiqué le Shugendō, une pratique ascétique en montagne visant à l’éveil spirituel. La légende raconte d’ailleurs qu’après sa mort, il est devenu un être surnaturel appelé Tengu qui veille sur Ishizuchi ainsi que les pratiquants du Shugendō. Les Tengu assument le rôle de protecteurs et sont les gardiens spirituels des montagnes sacrées. Ils guident les pratiquants sur leur chemin spirituel, à la fois protecteurs, à la fois mentors. Ils testent aussi le dévouement et la détermination des ascètes sur le chemin de l’éveil. Symboliquement, les Tengu incarnent la dualité du bien et du mal inhérente à leur double nature à la fois des gardiens et protecteur, à la fois démoniaques et farceurs . Dans le folklore japonais, les tengu sont traditionnellement représentés avec un long nez, généralement rouge ou noir. De nombreux masques de tengu parent le temple. Leur nez proéminen

Purification Shugendō

Après s’être prosterné, Xavier verse de l’eau sur la petite statue en pierre d’une divinité bouddhiste, il remercie et pose l’intention de la purification. Vêtu de l’habit blanc du pèlerin, il suit le moine qui nous emmène vers la chute. Un après l’autre, nous nous abaissons devant la statuette, devant la divinité pour entrer dans cette cérémonie de purification. Pieds nus, nous marchons dans la petite rivière à l’eau limpide et revigorante. Alignés le long de la falaise, nous sommes en petit cercle devant la chute d’eau. Le moineKensei Jin-no commence par une prière, puis il entre sous la chute et y reste durant quelques minutes. Ensuite, Xavier se place sous l’eau froide dont le plongeon de plus de 15 mètres lui arrive directement sur ses épaules. Les mains jointes au niveau du cœur, il se relie à l’élément de l’eau. Après quelques minutes, il se retourne. Le moine récite alors quelques sutras en lui frappant légèrement le dos avec un objet sacré. C’est à mon tour. Je fais un pas so

Au son des coquillage

Nous découvrons une des plus anciennes traditions de la montagne sacrée d’Ishizuchi. Alignés sur une petite table devant le temple Gokurakuji, nous découvrons les Horagai, des énormes coquillages en forme de conque. Provenant des îles d’Okinawa ou des Philippines, ils sont utilisés comme des instruments de musiques, grâce à leur chambre de résonance naturelle. Le moine Kensei Jin-no nous fait tout d’abord une démonstration, avec plusieurs mélodies qui symbolisent les messages traditionnellement utilisés par les pèlerins pour communiquer dans la montagne. Les sons peuvent être graves ou aigus en fonction de la signification qui leur est associée. Souffler dans le horagai est une manière d’annoncer que l’on monte sur un chemin, que l’on entre dans un temple, que l’on demande à participer à un rituel ou que l’on exprime sa gratitude. Les sons dépendant aussi de la tradition locale reliée à chaque montagne sacrée. Vers le mont Ishizuchi cette pratique était si courante que même le facte

Rencontre officielle

Aujourd’hui, le maire passe en visite officielle pour nous saluer. Il entre avec sa délégation et nous offre des cartes topographiques ainsi que 200 autocollants « I love Saijo ». Bien qu’en retraite au milieu des montagnes, la municipalité de la ville, après avoir appris notre passage dans la région, vient nous saluer. Le maire, enthousiaste et dynamique, est ravi de nous rencontrer. Ce moment de partage nous permet d’en apprendre davantage sur la région ainsi que ces enjeux. Comme à chaque fois, nous soulignons l’importance de passer du temps en nature, même si pour la majorité des personnes, ce temps en nature est le dernier sur la liste. Nous vivons dans un monde où la productivité et l’efficacité s’insèrent jusque dans les berceaux des bébés. Et si être dehors n’était pas seulement un passe-temps lorsqu’il fait beau, ou un sommet de plus à atteindre, mais répondait réellement à un besoin de tout notre être ?  Deux jours plus tard, nous sommes conviés à une soirée. De nombreuse

La maison est secouée

Il est 21 heures. Nous sommes paisiblement assis sur de petits cousins plats, face à une table basse en train de boire une infusion. Dehors, les fenêtres dévoilent une nuit noire où les étoiles se détachent, encore plus brillantes qu’à l’ordinaire, en dessus des cimes des majestueux cèdres du Japon . Soudain, les fenêtres commencent à taper, les bruits s’accentuent, la maison bouge. Un tremblement de terre! Nayla et Fibie dorment en haut dans leur futon sur les tatamis. Tout bouge, tout tremble, et le vacarme de la maison secouée est de plus en plus fort. J’allais rejoindre les filles, lorsque finalement tout s’arrête. Le bruit, les secousses. Tout redevient paisible. Nous plongeons à nouveau dans le silence. Les remous viennent de l’intérieur, des veines dont le sang pulse avec ardeur, des battements du cœur qui tambourinent notre poitrine. Nayla et Fibie ne se sont pas réveillées. Elles poursuivent leur nuit tendrement enroulée dans leur cocoon en soie. La terre a parlé, difficile de

Un sanctuaire pour écrire

La petite vallée nous emmène au cœur des forêts luxuriantes. Après un col, nous découvrons un lac bleu cobalt, un barrage. L’eau serpente entre les arrêtes des montagnes qui plongent directement en son sein. Nous longeons ensuite la petite rivière Kurose. Elle nous guide jusqu’à Furai No Sato. C’est ici que nous rencontrons Tamura San, un homme d’une trentaine d’années. Grand et fin, il est surtout un passionné aux idées innovantes. Il rénove des maisons traditionnelles. Au Japon, les maisons sont souvent abandonnées. Les petits villages sont délaissés par les plus jeunes générations préférant vivre dans les grandes villes. Les maisons familiales sont le lieu où résident les ancêtres dont les urnes ont généralement été enterrées dans la propriété. Ces maisons ne peuvent être vendues et ne sont plus habitées. De même, elles ne sont pas rachetées à cause des esprits qui pourraient les hanter. Il n’y a donc ni l’offre ni la demande. Le Japon que nous découvrons risque bien d’avoir un tout

Séance d’acupuncture

À Saijo, nous plantons la tente devant les superbes maisons traditionnelles du coworking space Kikuko de Soichiro Hino San. C’est un lieu magique où l’on ne peut qu’être qu’au Japon, que ce soit par l’architecture, mais aussi les hautes montagnes luxuriantes qui s’élèvent en arrière-fond . Parfois, on entend le passage furtif des Taïko lors des entrainements pour les festivals. Ils annoncent les sanctuaires portables Mikoshi pour les kamis et divinités shintoïstes. Nous rencontrons aussi la Grand-Mama de 93 ans qui vit seule, jardine et se prépare de petits plats à chaque repas. Elle est ravie de voir Nayla et Fibie courir dans le jardin ! D'entendre leur cris d'enfants.  Nous utilisons le co-working (https://kikuko-setouchi.com/) space pour travailler sur un projet de livre au Japon. C’est vraiment un lieu magique pour éveiller les inspirations. Midori San vient aussi nous y retrouver avec son chien Maru. C’est un tel plaisir de la revoir et de partager un moment ensemble. La

Le long de la mer de seto

Durant les soirées à Yawatahama, Fibie et Nayla font des concerts avant d’allumer des allumettes Bengale, les hanabi, les fleurs de feu au Japon. Dans le cœur des Japonais, les soirs d’été portent les souvenirs joyaux des feux d’artifice, plus qu’un jeu c’est une tradition. Lors d’une soirée, la bouteille de vin locale tombe malencontreusement dans la rivière. Nayla a été tellement choquée et outrée de voir par deux fois des passants lancer des déchets dans la rivière, que les filles ne sont pas d’accord. Nous allons alors trouver le moyen de la récupérer dans le canal grâce à de menus escaliers qui rejoignent le courant où de nombreux poissons sautent. Nous avons réussi à rescaper la bouteille, mais c’était surtout important pour les filles de ne pas laisser de détruits dans la rivière. Elles trouvent inadmissible que ces gestes existent. « Comment peut-on aller polluer la maison des autres ? » Toyohito et Mayumi nous rendent ensuite la lampe frontale que nous avions oubliée lors d